A'CORP

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L’égalité absolue est le comble de l’injustice.

A de A'CORP, cabinet d'avocats spécialisés en dommage corporel, à,Paris
L'importance d'une expertise médicale est expliquée dans cet article rédigé par nos avocats, illustré par des outils propres à un expert médical
Emois d'avocat,  Florence Boyer

INDEMNISER UNE VICTIME SANS EXPERTISE MÉDICALE PRÉALABLE OU MESURER SANS MÈTRE ET PESER SANS POIDS !

Dans la plupart des dossiers de contamination post-transfusionnelle par le virus de l’hépatite C (VHC), l’ONIAM formule une offre indemnitaire sans expertise médicale contradictoire préalable – et même souvent sans conclusions médicales.
L’ONIAM ne fournit aucune information à la victime sur les éléments qui ont servi à son évaluation.
S’agit-il d’un « avis » de son propre médecin conseil ? En tout état de cause, cet avis n’est pas communiqué à la victime, celle-ci n’a pas été examinée, entendue, et n’a pas même exposé son parcours ni ses doléances.
A fortiori son conseil n’a-t-il jamais pu intervenir pour débattre contradictoirement de ce qui est le cœur d’un dossier d’indemnisation, c’est-à-dire le dommage : son origine, sa nature, son traitement, son évaluation, son retentissement sur la vie de l’intéressé etc…
L’Office sait tout, fait tout, tout seul : il connaît la victime sans l’avoir vue ni entendue, il est un spécialiste des hépatites, de leurs traitements et de leurs effets et de leurs résultats…
Il décrète donc, sans nécessité d’explications de l’intéressé et encore moins de discussions, que le préjudice de la personne atteinte est réparé par l’allocation d’une somme de X €.
L’expertise médicale est superflue, le débat contradictoire n’est pas de mise.
Pourquoi s’embarrasser de complications inutiles alors que l’on peut faire si simple !
Cette pratique de l’ONIAM n’étonnera pas les familiers de l’Office.
Ils seront autrement surpris que certains tribunaux administratifs, devant lesquelles les victimes se voient contraintes de contester les diktats de l’ONIAM, emboîtent le pas de cet Office.
En effet, dans ces dossiers, les juridictions administratives refusent de plus en plus fréquemment d’ordonner une mesure d’expertise médicale préalable.
A leurs yeux cette mesure ne présente aucun caractère « d’utilité » et l’étude des pièces du dossier suffit à « se faire une idée » de l’étendue du préjudice.
Balayée la nomenclature Dintilhac !
En réponse à la demande d’expertise médicale préalable refusée, le juge administratif enjoint à la victime de chiffrer sa demande sous peine d’irrecevabilité de sa requête, sans conclusions médicales contradictoirement débattues.
Cette situation totalement aberrante en droit de la réparation du dommage corporel, oblige la victime à se faire l’expert de sa propre maladie et à auto-évaluer ses préjudices. Inédit ! Cette tendance s’accentue d’années en années et contraint les victimes à contester ces décisions bancales en appel.
Ces pratiques s’étendent, de manière inquiétante, à d’autres domaines que celui des contaminations post-transfusionnelles. On a pu les observer dans des dossiers de responsabilité médicale complexes mettant en jeu, par exemple, tout l’avenir d’un enfant victime d’un accident de naissance.
Il est urgent de dénoncer ces dérives qui, non seulement dévoient la loi de 2008 de son but, contraignant les victimes à engager des contentieux qui doivent parfois être portés jusque devant les cours d’appel, voire même jusqu’en cassation, mais surtout délivrent un message particulièrement regrettable aux victimes, message qui semble être le suivant :
“Puisque vous n’avez pas accepté l’offre misérable de l’ONIAM fondée sur des cotation que vous n’avez jamais pu discuter, vous serez punis pour avoir introduit un recours en sollicitant avant-dire droit une expertise médicale. Ce recours va durer des années et celui-ci vous refusera vraisemblablement cette mesure préalable indispensable à vos yeux, mais inutile à ceux du magistrat qui semble davantage soucieux de préserver les deniers de l’Office que de réparer décemment et intégralement les victimes.”

S’il était encore nécessaire de démontrer l’utilité d’une mesure d’expertise dans ces dossiers, il sera cité une décision du TA de PARIS (TAP 15 mai 2020, n°1608008/6-3) qui, après expertise médicale judiciaire et alors même que l’office n’avait pas jugé bon d’en organiser une amiablement a multiplié par 8 l’indemnisation offerte par l’office.


Florence BOYER